ASSURANCE MALADIE-MATERNITÉ : MAÎTRISER LA PROGRESSION DES DÉPENSES POUR PÉRENNISER NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ

15.10.2025

Position et Opinion de l’UEL

L’UEL a participé à la quadripartite du 13 octobre en tant qu’organisation représentative des employeurs, siégeant en cette capacité au Conseil d’administration de la Caisse Nationale de Santé (CNS), qui assume la gestion opérationnelle et administrative de l’Assurance maladie-maternité (AMM).

La Ministre de la santé et de la sécurité sociale avait convoqué le comité quadripartite réunissant, outre la Ministre de la sécurité sociale, le Ministre des finances, les représentants des organisations professionnelles les plus représentatives des salariés et des employeurs, ainsi que ceux des groupements professionnels prévus à l’article 80 du Code de la Sécurité Sociale. Conformément à cet article, et sur base d’un rapport établi par des experts, le comité quadripartite « examine l’évolution des recettes et des dépenses en matière de santé et propose des mesures sur le plan légal, réglementaire, conventionnel ou statutaire, ainsi que toutes autres mesures destinées à améliorer l’efficacité du système de santé ».

Contexte économique, situation financière et réalité mathématique
Le constat est sans détour : le système de santé luxembourgeois fait face à un déficit structurel croissant, alimenté par l’évolution galopante des dépenses face à des recettes moins dynamiques. Les projections financières montrent que, sans mesures correctrices rapides et ambitieuses, les recettes de l’assurance maladie-maternité ne permettront plus de couvrir durablement les dépenses. Le déficit devrait s’accentuer, passant à 118,6 M€ en 2025 (soit plus d’un quadruplement comparé à 2024 encore) à 209,3 M€ en 2026 selon les prévisions. En conséquence, les réserves se contracteraient, passant de 20,6 % des dépenses en 2024 à 11,7 % en 2026.

Dans un contexte économique marqué par un ralentissement de la croissance économique et donc aussi de la croissance de l’emploi, les recettes contributives n’ont progressé que de 5,1% en 2024 alors que les dépenses de santé ont augmenté de 8,2% durant la même année. Cette réalité économique et mathématique impose de ralentir le rythme de progression des dépenses et d’en reprendre le contrôle de manière structurelle.

Un effort collectif et partagé
À l’issue de pourparlers intenses entre les partenaires sociaux siégeant au Conseil d’administration de la CNS et l’État, un compromis responsable a pu être trouvé, au terme d’un processus exigeant. Ainsi, l’État s’engage-t-il à verser 59 millions d’euros par an à partir de 2026, et ce pour une période de cinq ans, sous la forme d’un remboursement forfaitaire de certaines dépenses qui ne relèvent pas directement du cœur de mission de la CNS — telles que les dépenses en matière de prestations de maternité ou certains investissements hospitaliers. Cet engagement constitue une étape importante vers une clarification des responsabilités financières et une gouvernance plus efficace du système de santé.

La Quadripartite réévaluera la situation à l’automne 2026, afin de déterminer, au vu de l’évolution de la situation financière et économique, si une adaptation du taux de cotisation s’imposera à partir de 2027. Pour l’UEL il est clair qu’une telle mesure ne pourra être envisagée qu’en dernier recours, car elle ne constituerait pas une solution durable. Si tel est le cas, une hausse du taux de cotisation devra impérativement être accompagnée de mesures fortes et structurelles destinées à ralentir le rythme de croissance des dépenses et à rétablir l’équilibre financier. Sans mesures correctrices, une hausse des cotisations serait rapidement absorbée, et s’apparenterait davantage à une fuite en avant qu’à une mesure structurelle.

 Une feuille de route pour une trajectoire soutenable
A également été présentée une feuille de route ambitieuse élaborée par l’administration de la CNS en collaboration étroite avec le Conseil d’administration de la CNS au sein d’un groupe de travail commun avec le ministère de la Santé. Cette proposition vise à redresser progressivement la trajectoire financière de l’assurance maladie-maternité tout en renforçant l’efficacité et la transparence du système.

La feuille de route marque une innovation importante en matière de gouvernance, avec la création d’un Comité stratégique à composition quadripartite, intégrant désormais les prestataires de soins aux côtés de l’État et des partenaires sociaux. Ce Comité aura pour mission d’assurer un pilotage coordonné, d’évaluer les réformes engagées et d’orienter les priorités d’action à moyen terme. En parallèle, des groupes de travail thématiques réunissant partenaires sociaux et prestataires approfondiront les mesures identifiées et les compléteront par des propositions concrètes issues du terrain.

L’objectif central de cette démarche est de mobiliser l’ensemble des acteurs autour d’une ambition collective : préserver un système de santé solidaire, où le patient reste au centre des préoccupations. Le redressement de la trajectoire financière nécessitera que chacun — État, employeurs, salariés et prestataires — assume pleinement sa part de responsabilité, dans un esprit d’efficacité, de transparence et de résultats.

Une clause de rendez-vous en 2028 permettra d’évaluer l’impact de ces mesures et, le cas échéant, d’ajuster le cadre légal pour maintenir la trajectoire financière sur des bases saines et soutenables.

Cohérence de l’offre de santé
Notre système de santé doit être guidé par une vision stratégique nationale, cohérente et coordonnée, plutôt que par la multiplication désordonnée des offres de soins. Nous ne pouvons pas nous permettre de dupliquer ou fragmenter indéfiniment les structures, antennes, cabinets ou équipements, alors même que les ressources, tant humaines que financières, restent limitées. Chaque nouvelle installation ou service doit s’inscrire dans un plan global, qui assure l’efficacité, la complémentarité et la soutenabilité de l’offre de santé à l’échelle du pays.

La Quadripartite a permis de dégager un compromis équilibré, fondé sur la responsabilité et la concertation entre l’État et les partenaires sociaux. Il convient cependant de ne pas perdre de vue le contexte économique général qui influe directement sur le niveau des recettes et, partant, sur la soutenabilité des taux de cotisation. Toute décision future en la matière devra donc s’inscrire dans une approche prudente et équilibrée, où l’adaptation des cotisations ne saurait être envisagée qu’en dernier recours, et toujours accompagnée de mesures structurelles pour maîtriser la croissance des dépenses.

Il appartient désormais à chacun des acteurs de traduire cette approche dans les faits, dans un esprit d’efficacité et de transparence, afin de préserver la pérennité financière du système et de garantir un accès solidaire et équitable aux soins pour tous les assurés.

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