Position de l’UEL suite à l’annonce de la hausse du SSM

20.11.2020

L’UEL constate avec stupéfaction que le Gouvernement prévoit d’augmenter le Salaire social minimum (SSM) de 2,8% dès le 1e janvier 2021. Une telle hausse dans le contexte de crise économique actuel n’est tout simplement pas soutenable.

Toute hausse du SSM va non seulement détruire davantage d’emplois existants, mais aussi empêcher la création de nouveaux. La priorité pour l’UEL est de préserver le tissu économique et de lutter contre le chômage.

Nous vivons une crise économique sans précédent. La situation actuelle à Luxembourg est exceptionnelle de par l’ampleur de la crise économique (chute du PIB en 2020 de 7%, soit plus de 4 milliards de richesses perdues en 2020) et par le fait que les mesures prises pour lutter contre la pandémie du Covid-19 frappent plus certains secteurs de notre économie (Horeca, Commerce, Tourisme, Evenementiel, Soins à la personne, Formations, Culture…) que d’autres.

Cette hausse viendra s’ajouter à une augmentation cumulée totale du SSM de plus de 70% depuis 2000. Rien que sur les 2 dernières années, le SSM s’est envolé de plus de 7% ! Ce dérapage est d’autant plus préoccupant que le SSM est totalement déconnecté de la réalité du marché de l’emploi de nos pays limitrophes (et même de l’ensemble des pays européens).

Vu cette cadence infernale d’augmentation, le SSM couvre une proportion importante et croissante des salariés hors fonctionnaires. L’UEL attire l’attention sur cette vive progression, qui a été bien plus marquée encore dans des secteurs comptant déjà auparavant la plus forte proportion d’employés se situant au voisinage du SSM – ce qui contribue à accentuer la polarisation de l’économie grand-ducale.

Une hausse du SSM de 2,8% entraînera un surcoût de plus de 60 millions EUR pour les entreprises luxembourgeoises, sans compter l’impact sur la grille générale des salaires de notre économie. Ce surcoût impacterait spécifiquement les secteurs qui emploient un grand nombre de salariés rémunérés au SSM alors qu’il s’agit déjà des secteurs qui sont le plus touchés par la crise (minimum 8 millions EUR pour l’Horeca et 15 millions EUR pour le commerce et le transport). Une telle hausse pèsera de manière écrasante sur ces secteurs très intensifs en main-d’œuvre. L’annonce d’une compensation de 500 EUR par salarié bénéficiant du SSM (et SSM qualifié) jusqu’à fin juin pour les seules entreprises bénéficiant du plan de relance (secteurs vulnérables) est une maigre consolation, car la hausse du coût salarial liée à cette décision perdura bien au-delà de cette date et impacte la compétitivité de toutes les entreprises du pays.

Le mécanisme d’adaptation du SSM est injuste dans le sens où la hausse des salaires dans certains secteurs économiques (finance, technologie, IT…) entraîne par ricochet une hausse des salaires sur les autres secteurs économiques, sans tenir compte de l’évaluation de la productivité dans ces secteurs. En conséquence, ces derniers voient leurs charges salariales augmentées infligeant une nouvelle perte de compétitivité vis-à-vis des entreprises des pays limitrophes (non soumises à ce mécanisme) et augmentant le risque de perdre d’éventuels marchés publics.

Les autorités publiques incluant les administrations locales, devraient, dans un tel contexte, prendre leur responsabilité et renoncer à toute mesure qui, en pénalisant ces secteurs, intensifs en main-d’œuvre, risquerait de porter le coup fatal à bon nombre d’entreprises. Ainsi, plusieurs décideurs politiques appelés à se prononcer sur la question du relèvement du SSM ne vont-ils pas, par la suite, devoir exclure des entreprises luxembourgeoises de marchés publics qu’ils négocient dans d’autres fonctions alors qu’ils auront eux-mêmes contribué à la détérioration de la situation compétitive des entreprises touchées ? Il s’avère qu’en leur qualité de maître d’ouvrage, le niveau du SSM ne les intéresse guère.

Outre le risque de perte d’emplois suite à d’éventuelles faillites des entreprises, l’augmentation du SSM renforcera encore les difficultés des moins qualifiés à  trouver un emploi ; ce qui aura pour conséquence d’accroitre le chômage.

L’UEL est toutefois parfaitement consciente du fait qu’il est difficile pour un ménage gagnant le SSM et vivant au Luxembourg de joindre les deux bouts. Le constat est évident, mais il s’agit d’attaquer le problème de manière intelligente. La principale cause de ces difficultés financières est le coût croissant du logement. Il est toutefois naïf de penser que nous résoudrons ce problème en augmentant le SSM. Le SSM ne peut pas constituer la variable d’ajustement d’un marché immobilier sous tension.

L’UEL tient à rappeler que la hausse biennale du SSM n’est absolument pas automatique comme d’aucuns le pensent à tort. L’article L.222-2, paragraphe (2) du Code du Travail dispose, que toutes les deux années, le Gouvernement « (…) soumet à la Chambre des Députés un rapport sur l’évolution des conditions économiques générales et des revenus accompagné, le cas échéant, d’un projet de loi portant relèvement du niveau du SSM ».

Il paraît évident que les « conditions économiques générales » qui, selon l’article L.222-2, paragraphe (2) du Code du Travail, doivent être prises en compte par le Gouvernement dans le contexte de la proposition d’une augmentation du SSM à la Chambre des Députés, ne permettent nullement de procéder à une telle revalorisation du SSM.

Sur base de cette situation objective et partant de la disposition du Code du Travail suivant laquelle le relèvement du SSM constitue une faculté et non une obligation, l’UEL considère que ce projet de loi doit être retiré sans délai du rôle de la Chambre des Députés.