INSTAURER UNE « SPHÈRE DE SÉCURITÉ » DANS LA GRANDE-RÉGION : LE TÉLÉTRAVAIL TRANSFRONTALIER COMME ÉTAPE IMPORTANTE POUR L’ATTRACTIVITÉ DU LUXEMBOURG

12.11.2025

Position et Opinion de l’UEL – Rédigé par Gwendoline Berger et Laura Bacharzyna

Moderniser le cadre du télétravail pour attirer et retenir les talents dans la Grande-Région.

La mobilité et la capacité à attirer à la main d’œuvre étrangère ont toujours constitué l’un des piliers du succès économique luxembourgeois. Aujourd’hui, près de la moitié des actifs dans l’économie contribuant à la prospérité du Grand-Duché sont des travailleurs frontaliers, essentiels à la compétitivité et à la pérennité de notre modèle socio-économique.

Gwendoline Berger

Senior Advisor of Tax

Laura Bacharzyna

Acting Head of Tax

Un recul qui interpelle et des attentes nouvelles
Pour la première fois en 2024, le nombre de travailleurs frontaliers belges et allemands a d
iminué1, après des décennies d’essor. Ce phénomène est d’autant plus préoccupant qu’il touche plus que proportionnellement des métiers télétravaillables ; ce qui met en lumière de nouveaux défis pour les employeurs en termes de recrutement, de rétention des talents et d’organisation de l’entreprise. Le télétravail s’est imposé pendant la pandémie comme un élément central de l’organisation du travail, notamment dans les branches et les métiers se prêtant particulièrement à cette forme de travail. Il est devenu aujourd’hui un atout pour attirer et fidéliser les talents. Pourtant, au Luxembourg, près d’une entreprise sur deux déclare avoir récemment perdu un candidat faute de flexibilité en matière de télétravail2.

Des freins persistants au télétravail transfrontalier
Les entreprises luxembourgeoises restent limitées dans leur capacité à proposer du télétravail transfrontalier, en raison de contraintes fiscales, administratives et de sécurité sociale. Les charges déclaratives supplémentaires et les coûts y afférents ou encore, la crainte de créer un établissement stable et d’être soumis à une imposition à l’étranger freinent la possibilité du télétravail pour les employeurs luxembourgeois et leurs salariés frontaliers.

Une « sphère de sécurité » à 25% : une solution innovante et équilibrée
Face à ces enjeux, l’UEL et ses membres proposent la création d’une « sphère de sécurité » pour le télétravail transfrontalier, alignée sur le seuil de 25 %, déjà reconnu par la législation européenne en matière de sécurité sociale. En pratique, cela permettrait :

  • de neutraliser le risque d’établissement stable jusqu’à ce seuil ;
  • de permettre aux employeurs qui le jugent opportun d’offrir à leurs salariés frontaliers la possibilité de télétravailler jusqu’à 25 % de leur temps en toute neutralité fiscale et sociale ; 
  • de simplifier et d’alléger la charge administrative des employeurs en clarifiant les règles et supprimant les obligations déclaratives locales. 

Cette proposition, en ligne avec les recommandations faites en mars 2025 par le Parlement Benelux3, répond à la fois aux besoins des entreprises et à ceux des salariés, tout en assurant un équilibre entre secteurs d’activité (dont certains sont plus dépendants que d’autres quant à la présence physique des salariés sur leur lieu de travail), statuts des salariés (certains métiers étant plus télétravaillables que d’autres) et pays impliqués.

Vers une solution globale pour la Grande-Région
La mise en place d’une telle « sphère de sécurité » permettant le télétravail transfrontalier jusqu’à 25 % constituerait une étape clé vers une approche globale, qui aboutirait à un espace régional encore davantage propice au développement des activités économiques pour les entreprises et leurs salariés.

Concrètement, l’UEL et ses membres préconisent la mise en place, à terme, d’un portail digital déclaratif unique (« one-stop-shop »). Ce portail dédié centraliserait toutes les démarches administratives liées au travail, à la fiscalité et à la sécurité sociale pour les employeurs de la Grande Région. Une telle initiative faciliterait l’intégration socio-économique au sein de la région, en améliorant la fluidité des échanges économiques, la mobilité des travailleurs et la prestation de services transfrontaliers. En exploitant pleinement les opportunités offertes par l’écosystème transfrontalier, cette solution globale participerait à dynamiser l’activité économique au sein de la Grande Région.

Un appel à l’action pour le Luxembourg
Il est aujourd’hui essentiel que le Luxembourg prenne l’initiative de moderniser le cadre du télétravail transfrontalier en instaurant une solution pérenne, équilibrée et avantageuse pour tous. La mise en œuvre d’une « sphère de sécurité », permettant jusqu’à 25 % de télétravail transfrontalier, sans incidence négative sur la fiscalité ou la sécurité sociale (tant pour les entreprises que les salariés), offrirait aux entreprises la possibilité de renforcer leur compétitivité, de répondre aux attentes de leurs salariés et de contribuer à la pérennité économique du pays ainsi que de la Grande Région.

Cette étape ouvrirait la voie à la construction d’un projet ambitieux d’une Grande Région intégrée dans un « espace économique et de travail transfrontalier » étendu, interconnecté et simplifié facilitant ainsi les activités économiques transfrontalières sans complication inutile, au bénéfice des entreprises comme des salariés.

La Grande-Région constitue un véritable laboratoire européen, mettant concrètement en œuvre les libertés fondamentales de la construction européenne. Il est temps de poser les prochains jalons.  

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